Le Pr. Maurice Kamto et l’honorable Cabral Libii doivent-ils, dans un débat télévisé, échanger leurs points de vue respectifs sur la marche du pays ? Doivent-ils partager, avec l’ensemble des Camerounais, leur vision de la société dans un duel retransmis en direct ?
En effet, depuis l’éclosion d’une velléité devenue aussi pressante qu’obsessionnelle visant à mettre aux prises le président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) et son homologue du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (Pcrn), la blogosphère est en haleine.
Tout le monde y va de sa perception, sans pour autant remettre en question le principe du débat dans un système pluraliste. Preuve s’il en était encore besoin, que les Camerounais aspirent à une République aux pratiques et habitudes démocratiques plus contemporaines, à l’image de ce qui se passe ailleurs, où tous les aspirants – supposés ou réels – à la magistrature suprême, débattent sans aucun référendum préalable.
On pourrait opportunément prendre pour exemple le débat des extrêmes en France, entre Éric Zemmour et Jean Luc Melenchon, farouches opposants à Emmanuel Macron, tenu quelques mois avant la présidentielle. Ils avaient deux visions diamétralement opposées de la France, avec des antagonismes clairs sur l’immigration, les questions identitaires et la sécurité.
Tout le contraire entre Maurice Kamto et Cabral Libii, dont les lignes de démarcation socio-économique, sécuritaire et politique sont relativement divergentes. Du moins, leurs idées se complètent, s’imbriquent, mieux qu’elles ne s’opposent de façon outrancière et tranchée.
Autant dire d’emblée que les deux leaders ont plus à gagner en débattant avec les voix les plus autorisées du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), dont les quarante années de gouvernance de leur président national affichent un bilan à la fois mitigé et controversé. La démocratie en serait alors carburée d’un flot de contradictions structurelles sur des thématiques de fond, tels que le code électoral, la guerre anglophone, les libertés fondamentales et notamment le droit de manifester publiquement sans être inquiété, la politique étrangère, le climat, la corruption etc.
Par contre, un duel prématuré à trois ans de la présidentielle et sans objectifs politiques et stratégiques clairs entre les deux principales figures de l’opposition, servirait de carburant à leur adversaire commun, à savoir le parti au pouvoir. L’idée d’une opposition qui se trompe de cible majeure et enchaîne les atermoiements en sortira renforcée.
Njiki Fandono