La Bourse des valeurs mobilières des Etats de l’Afrique centrale (BVMAC) dégagent des stratégies à mettre en œuvre pour échapper à ce triste sort, comme ouvrir leur capital à d’autres actionnaires pour éviter la faillite.
D’abord des chiffres. Ils sont de l’Institut national de la statistique (INS), dans un rapport récent : 95% des PME/PMI détenues par un seul propriétaire disparaissent au bout de 10 ans et en ce qui concerne les groupes familiaux, le taux de décès frôle les 100 % surtout après la mort du fondateur.
Une situation douloureuse, que la Bourse des valeurs mobilière des Etats de l’Afrique centrale (BVMAC) voudrait corriger, en donnant la parole aux voix capables d’aider à sauver ces infrastructures de création de valeur ajoutée. « On a constaté, depuis bientôt trente ans, que la faillite des entreprises familiales, des PME et PMI sont fréquentes dans la CEMAC. Le constat est inquiétant. En général, elles ne survivent pas après le décès du fondateur. Des quelques entreprises qui constituaient le fleuron de l’économie des pays de la CEMAC dans les années 90, particulièrement au Cameroun, on notait, entre autres, le Groupe Soppo Priso, prospère dans l’immobilier, la santé, etc.; le Groupe Fadil, le groupe Agar, le Groupe Ndongo Essomba, le Groupe Nziko, T. Bella, le Groupe Fotso. Ces disparitions prématurées ne permettent pas la constitution d’un tissu d’entreprises solide susceptible de soutenir un développement social et économique dans les pays de la CEMAC, dans la mesure où la création des richesses repose sur ces entreprises », observe le Centrafricain Aboubakar Salao, économiste, ex-directeur général de la Banque des Etats de l’Afrique centrale et ex-secrétaire général de la Commission bancaire de l’Afrique centrale la COBAC.

Au sujet des causes de ces faillites, il ressort que ces entreprises sont gérées dans la plus grande opacité, ignorant de surcroit la culture de la bonne gouvernance, de la rigueur et la transparence ; les biens et la trésorerie de ces entreprises sont considérés par leur gérant ou leur fondateur comme étant leur propriété. Par conséquent, le chiffre d’affaires est confondu au bénéfice, ce qui constitue un problème qui s’accentue avec le temps.
Une autre cause de faillite, poursuit le Centrafricain cité plus haut, c’est un mauvais suivi de ces entreprises par les créanciers, notamment les banques, les fournisseurs et l’Etat. Un fournisseur devrait, par exemple, s’assurer que le prêt qu’il fait à l’entreprise en termes de matière première est bien utilisé. Par ailleurs, l’on note le mauvais suivi et l’encadrement de ces entreprises par l’Etat, en tant que puissance publique, car une entreprise concentre plusieurs intérêts qui doivent être protégés. De même, les organes de contrôle interne et externe de ces entreprises, notamment les commissaires aux comptes, sont inopérants. « Sans contrôle, tout est permis. Très souvent, même les gestionnaires de ces entreprises ignorent ce qui se passe dans leur dos. »
Bien plus, l’on pointe le manque de projection. « Dans les entreprises familiales, il n’y a pas de plan de succession crédible et incontestable par les nombreux héritiers. Souvent le fondateur laisse une progéniture abondante, qu’il avait déjà du mal à bien gérer de son vivant. Par conséquent, quand il n’est pas là, ce sont de violents et inextricables conflits entre les héritiers. Généralement ces conflits sont portés devant les tribunaux, ce qui complexifie la gestion et mène à la faillite. Dans la plupart des cas, les héritiers n’ont pas été préparés à la gestion ; ils n’ont pas la maîtrise du savoir-faire, des relations stratégiques plus ou moins avouables du fondateur. En conséquence de tout ce qui précède, les héritiers, au lieu de se retrouver pour envisager ensemble les moyens de gestion sereine de l’entreprise, se lancent dans des luttes de pouvoir qui entrainent fatalement sa disparition », soutient Aboubakar Salao.
Ainsi, lors du premier Forum Talk Invest organisé par la BVMAC à Douala, Louis Banga Ntolo le patron de céans a dégagé quelques pistes. « Je peux estimer en guise de solution, une introduction des sociétés à la bourse, en vue d’une ouverture du capital à d’autres partenaires, ce qui offre de nombreux avantages. Lorsque vous venez en bourse, vous devez au préalable régler les nombreuses lacunes citées plus haut, ce qui régularise le système de gestion. La bourse ouvre ainsi grandement la voie aux sociétés pour de nouveaux financements, ceci à travers deux outils principaux, notamment l’entrée au capital. Une fois entré en bourse, il y a la possibilité d’avoir accès aux emprunts obligataires pour financer l’essor de l’entreprise. L’entrée en bourse d’une entreprise augmente sa notoriété et sa crédibilité. Par ailleurs, l’entrée en bourse d’une société lui permet de liquéfier ses actions qui prennent ainsi de la valeur et peuvent être facilement vendues ; elle facilite les acquisitions et rend la société plus crédible auprès de ses fournisseurs et lui donne accès au crédit à taux favorable auprès des banques. »
Aloys Onana